Crapounifon reviewed Les derniers et les premiers by Olaf Stapledon
Nous étions les Derniers
4 stars
Tout d'abord, un film, Last and first men de Johann Johannsson. La présentation sur Arte me l'avait fait ajouter à ma liste à-visionner. Un article élogieux de Deidre, ancienne bookwyrmeuse, dans son blog Un spicilège, m'a ensuite rappelé de le regarder.
Quel étrange objet, expérience audiovisuelle, une musique hypnotique,des plans fixes, de lents travellings sur d'étranges structures admirablement prises en vue, dans un brouillard et un noir et blanc contrasté et la voix off, bien choisie, de Tilda Swinton, délivrant le message. Une humanité lointaine, dans l'espace mais surtout dans le temps, nous délivre un message d'adieu. Cet humanité très différente, épanouie et fraternelle, sait sa fin, due à un cataclysme cosmique qu'elle ne pourra, cette fois, éviter.
Le réalisateur a fait ici son premier... et dernier film, il est décédé peu de temps après la post-prod'. Il est aussi le compositeur, en sus sur son film, notamment des …
Tout d'abord, un film, Last and first men de Johann Johannsson. La présentation sur Arte me l'avait fait ajouter à ma liste à-visionner. Un article élogieux de Deidre, ancienne bookwyrmeuse, dans son blog Un spicilège, m'a ensuite rappelé de le regarder.
Quel étrange objet, expérience audiovisuelle, une musique hypnotique,des plans fixes, de lents travellings sur d'étranges structures admirablement prises en vue, dans un brouillard et un noir et blanc contrasté et la voix off, bien choisie, de Tilda Swinton, délivrant le message. Une humanité lointaine, dans l'espace mais surtout dans le temps, nous délivre un message d'adieu. Cet humanité très différente, épanouie et fraternelle, sait sa fin, due à un cataclysme cosmique qu'elle ne pourra, cette fois, éviter.
Le réalisateur a fait ici son premier... et dernier film, il est décédé peu de temps après la post-prod'. Il est aussi le compositeur, en sus sur son film, notamment des bandes originales de deux films de Denis Villeneuve, Sicario avec Benicio del Toro et Emilie Blunt et le splendidissime Arrival (Premier contact).
Ce film évoque un autre ovni, La jetée de Chris Marker, statique, noir et blanc, qui inspirera L'armée des douze singes de Terry Gilliam.
Last and First Men est tiré du présent livre. Olaf Stapledon est un auteur semble-t-il aussi méconnu qu'inspirateur. Il aurait inspiré, rien moins qu'A.C. Clarke, Stanislaw Lem, Van Vogt ou encore Asimov. Egalement un physicien, Freeman Dyson, qui, après avoir lu son Le créateur d'étoiles étudiera ce que sera nommé par la suite la Sphère de Dyson, moyen pour une civilisation très avancée d'exploiter directement l'énergie d'une étoile.
Je n'ai jamais lu un tel contraste dans un livre entre son début et sa fin. J'avais lu que la début était dispensable.
Mais c'est plus qu'ennuyeux, outre que ce sont les deux premiers tiers, il s'agit d'une litanie d'une histoire imaginée faite de déclins, catastrophes, épidémies, guerres, quasi-extinction parsemés de sociétés plus ou moins prospères mais sans guère d'imagination sociale sur les structures futures. Une imagination hors sol, comme souvent en SF, avec ici peu de traces de lutte de classe, mais surtout un idéalisme (au sens philosophique) crasse et même débile.
L'auteur enfile également les clichés nationalistes ou racistes en faisant à plusieurs reprises du racisme à l'envers. P. ex., les Juifs peuvent être certes quasi-sauveurs de l'humanité, mais il écrit ça en 1930.
Et pourtant, le film m'a fait entrevoir, et donc tenir, une fin prometteuse.
Et pour cause, lorsque le Dernier Homme parle de son espèce, de la société qu'elle a formée, l'écriture se transforme pour parler comme d'un vécu qui en plus suscite l'enthousiasme sur cette société débarrassée de l'arriération et des conflits. Une société fraternelle enfin pleinement humaine car l'humanité fait son histoire et même son évolution, consciemment, explorant les sciences et les arts. Un cataclysme inéluctable en rendront la fin encore plus tragique surtout qu'il s'annonce par une lente déchéance. Une déchéance qui fera régresser cette humanité en l'handicapant de ces facultés. Ce qui la déprimera surtout, plus que ces maladies inconnues, sera les comportements qu'elles induisent et qu'elle n'avait jamais connus. Mais le courage et la coopération lanceront des graines, dont ce message.
C'est émouvant, poignant.
Le cataclysme peut faire penser au magnifique Diaspora de Greg Egan, la poésie, aux Chroniques martiennes de Bradbury, la transcendance, à 2001, l'odyssée de l'espace.
L'Homme lui-même, selon son rang, est éternellement une beauté dans la forme éternelle de l'univers : quelle bonne chose d'avoir été l'Homme.
Last and First Men est visionnable sur Arte jusqu'en avril.