Crapounifon reviewed La chose en soi by Adam Roberts
Ding an sich - what the fuck
5 stars
On se dit qu'avec une base d'astrophysique dans les années 1980, qui plus est en Antarctique, il va se passer des choses. On peut penser à Le problème à trois corps de Cixin, à The thing de John Carpenter (film cité) ou bien la mini-série La corde sur Arte. Et on n'est pas déçu, car en plus d'une bonne plâtrée de chose en soi, ce livre se pose en terme de what the fuck.
Si ce dernier terme n'est guère philosophique, ceux qui ont des restes de philo auront reconnu Kant à propos du titre. Le Ding an sich, si l'on veut briller dans les salons, on va en avoir à revendre dans une succession délirante et intemporelle, par définition.
Quand celui que vous allez devoir côtoyer dans un endroit coupé du monde est un peu asocial et fasciné par La critique de la raison pure ; et qu'en …
On se dit qu'avec une base d'astrophysique dans les années 1980, qui plus est en Antarctique, il va se passer des choses. On peut penser à Le problème à trois corps de Cixin, à The thing de John Carpenter (film cité) ou bien la mini-série La corde sur Arte. Et on n'est pas déçu, car en plus d'une bonne plâtrée de chose en soi, ce livre se pose en terme de what the fuck.
Si ce dernier terme n'est guère philosophique, ceux qui ont des restes de philo auront reconnu Kant à propos du titre. Le Ding an sich, si l'on veut briller dans les salons, on va en avoir à revendre dans une succession délirante et intemporelle, par définition.
Quand celui que vous allez devoir côtoyer dans un endroit coupé du monde est un peu asocial et fasciné par La critique de la raison pure ; et qu'en plus il prétend, grâce au grand œuvre de Kant, tout simplement résoudre le paradoxe de Fermi, ça peut au moins interpeller.
1900, un couple fait du tourisme en Allemagne et GLIIIITCH s'aident d'un guide (livre) pour découvrir histoire et monuments.
Puis nous aurons un long passage sur un commis, souffre-douleur, esclave, y compris sexuel, de nobles de l'Angleterre du XVIIème. Glauque, mais au dénouement, là encore, étonnant. L'écriture est virtuose, la graphie s'adapte (les « s » s'approchant des « f »).
Je n'en dis pas plus pour préserver suspens et désorientation spatiale et temporelle dont l'écriture participe.
C'est ainsi une succession de tesselles pour affleurer l'insondable, la mosaïque serait sinon insoutenable, car la chose en soi inconnaissable.
Le parallèle peut être fait avec Flatland d'Edwin Abbott. Un être en 2D ne peut appréhender en totalité un espace en 3D, tout comme nous ne pouvons apprécier un hypercube, cube de dimension 4.
En terme de pop culture, outre les précédemment cités, il y a évidemment Matrix (qu'est-ce que la réalité ?) mais aussi 2001, l'odyssée de l'espace (dont je vous laisse voir les allusions pour ne pas divulgâcher).
L'auteur a rendu fascinant ce côté hors de l'entendement grâce à cette raison métaphysique, aux deux sens, propre et figuré, des deux mots.
Un grand mérite de l'auteur est qu'il précise en postface être athée, mais Kant oblige, il a dû montrer un point de vue déiste.
On pourrait ajouter, que si Kant a eu des intuitions magistrales (sur les nébuleuses, la raison de la nuit noire), il n'en posait pas moins des limites à la connaissance. Des limites qui reflètent surtout les siennes, mais qui deviennent des barrières quand certains les remettent au goût du jour, notamment avec la mécanique quantique, voir ma récente lecture Le réel est-il voilé ? ou bien Le cantique des quantiques.
D'aucuns matérialistes ont répondu à cette critique de raison.
Peu d'ouvrages de SF parlent à ce point de philosophie. Je pourrais citer : * L'heure du taureau d'Efremov * Proletkult des Wu Ming * la saga des non-A de Van Vogt * certains Greg Egan
Quelques notions de philos suffisent.
Pour finir, une excellente surprise, à plus d'un titre, écriture, histoire et profondeur.